dimanche 5 février 2012

La vraie explication du flocage du maillot du Barça

Mis à part le petit logo "Nike", c'était le bon temps des maillots du Barça sans sponsor

Jusqu'en 2006, le FC Barcelone n'avait historiquement connu aucun flocage sur son maillot par un quelconque sponsor - soient 107 ans de virginité - puis Joan Laporta, ayant pris la présidence de juin 2003 à juin 2010, avait pour la première fois défloré le maillot du club en 2006 en lui apposant le sponsor d'une organisation mondiale : "UNICEF".
Le 10 décembre 2010, le Barça annonçait avoir signé un contrat portant jusqu'en 2016 faisant de la Fondation du Qatar (Qatar Foundation) le sponsor maillot du club à compter de la saison 2011-2012, empochant au passage 30 millions d'euros annuels.

Les non initiés peuvent penser à un acte 100% généreux et désintéressé dans le cas de l'UNICEF puis à un banal choix financier judicieux dans le cas de la Fondation du Qatar mais nous allons démontrer, au travers de la personnalité et des engagements de Joan Laporta et de son successeur qu'il y a une toute autre explication.

Laporta devant le drapeau de la Catalogne
(c) elmundo.es

Joan Laporta i Estruch appelé plus communément Joan Laporta est né à Barcelone le 29 juin 1962. En 1996, Laporta, avocat de formation, a pris part à la création d'un éphémère parti politique indépendantiste, le Parti pour l'indépendance.
En juin 2003, il prenait la présidence du Barça. "Je n'ai jamais fait mystère, quand je suis arrivé au club, de vouloir lui rendre sa catalanité".
L'un de ses premiers gestes fut de retirer le drapeau espagnol de la Masia, le centre de formation du Barça. Lors de sa première rencontre avec les groupes de supporters, il ne s'exprima qu'en catalan. A la suite de quoi il fut fortement recommandé aux nouvelles recrues d'apprendre cette langue.
Laporta termine son deuxième et dernier mandat à la tête du club catalan, le 30 juin 2010. Le 20 juillet de la même année, il crée un parti politique indépendantiste de gauche, Solidaritat Catalana per la Independència et se porte candidat en tête de liste pour les élections parlementaires catalanes. Son parti gagne 3,3% des votes et 4 sièges, dont un remporté par Laporta.

Il considère que l'Espagne vole la Catalogne. Il déclarait ainsi dans So Foot n°90 :
"La relation entre la Catalogne et l'Espagne c'est comme un couple qui serait en train de se déchirer. La Catalogne est comme une femme battue par son mari, l'Espagne. Et cette femme-là est en train de demander le divorce (...) Si la Catalogne ne dépendait pas de l'Espagne, on serait dans le top 5 des pays les plus prospères d'Europe (...) Chaque année, on nous vole 20 000 millions d'euros (...) Mon but et ma raison de vivre, c'est de faire de la Catalogne un Etat à part entière (...) Je veux être le Gandhi de la Catalogne, un leader pacifique, courageux et qui redonne l'estime de soi à ses compatriotes".


Un symbole fort : Laporta, indépendantiste catalan au siège des Nations Unies, en 2006, pour un accord entre le Barça et l'UNICEF (ronaldinho10.com)

Tout comme l'Athletic Bilbao pendant plus d'un siècle, le Barça demeura longtemps vierge de tout sponsor maillot. En 2004, l'Athletic cédait à la tentation mais adoptait un sponsor conforme à son éthique : celui du gouvernement autonome basque, «Euskadi». En choisissant l'Unicef en 2006, auquel il versa aux alentours de 1,5 million d'euros sur cinq ans, ainsi que 0,7 % des revenus de sa fondation, le FC Barcelone se différenciait de l'Athletic Bilbao - replié sur son identité basque - et plaçait emblématiquement la Catalogne dans le concert des nations.

"Nous voulons donner au FC Barcelone l'image d'un club avec un coeur" avait déclaré l'indépendantiste Laporta à ce moment-là.
Foutaises. Sous couvert de charité, c'est bien là un acte politique.

Les états européens s'étaient également engagés dans le même temps à verser 0,7 % de leur PIB à la campagne Millennium des Nations Unies contre la pauvreté et pour l'éducation. Quand les basques de l'Athletic optent pour un symbole politique et nationaliste, les catalans du Barça de Laporta choisissent une portée universelle et sociale.

Nous ne ferons qu'effleurer des notions comme celle de la "gouvernance mondiale" car ce n'est pas le propos d'un blog footeux mais il faut savoir brièvement que des élites mondialistes oeuvrent pour un monde globalisé, unifié.
Les plus sceptiques se reporteront à cette vidéo de Public Sénat dans laquelle le très influent Jacques Attali, conseiller des présidents Mitterrand et Sarkozy, prônait, sous couvert de bonnes intentions, une unité planétaire (de 0'50" à 1'47'') et comparait les nations à de vulgaires hôtels (8'37'') :
http://www.youtube.com/watch?v=WOlBXN91RQA

Pour arriver à leur fin, les élites mondialistes ont choisi comme stratégie de favoriser les régionalismes afin d'affaiblir les nations. C'est effectivement le cas au sein de la Communauté Européenne (qui n'est qu'une étape du projet mondialiste) sous domination de l'Allemagne, désireuse d'une Europe fédérale.
Des gens comme Laporta et comme tous les régionalistes sécessionnistes sont soutenus (souvent financièrement) par ces élites en vue que leur influence grandisse et affaiblisse les nations.
L'intérêt à court et moyen termes des sécessionnistes est de marcher de pair avec les mondialistes.

Sandro Rosell, le président actuel posant avec le maillot floqué du nouveau sponsor
(c) indiatimes.com

Le nouveau président du Barça est Sandro Rosell. Après des études en gestion d'entreprises et marketing à l'ESADE, Rosell avait débuté sa carrière professionnelle à l'âge de 23 ans dans la firme de parfums Myrurgia (marque du groupe catalan Puig) ce qui lui permit de connaître les pays du Moyen-Orient. Lorsque le Comité organisateur des Jeux olympiques de 1992 se mit à chercher des jeunes talents, le directeur de Myrurgia, Albert Agustí qui faisait partie de ce comité le recruta. Sandro Rosell raconte que "les contacts que j'ai pu établir à l'occasion des Jeux m'ont beaucoup servi par la suite. Dans toutes les étapes de la vie, tout est basé sur les relations". Rosell travailla ainsi dans le département des relations avec les sponsors internationaux et sa tâche d'alors consistait à faciliter les opérations commerciales de Coca-Cola, NBC ou Sports Illustrated.

Après les Jeux, Sandro Rosell devint gérant de la firme ISL fondée par la famille Dassler (Adidas) ce qui allait lui ouvrir les portes de Nike en 1996.
La firme américaine nommait Rosell responsable du marketing sportif pour l'Espagne et le Portugal et lui confiait une tâche très concrète : décrocher un contrat avec le FC Barcelone ou le Real Madrid. Après de dures négociations avec le président du Barça, Josep Lluís Núñez, Nike devint l'équipementier du FC Barcelone à partir de l'été 1998. Peu après, en 1999, Nike nomma  Rosell comme manager pour toute l'Amérique latine. Rosell s'établit au Brésil avec pour mission que le Brésil gagne un Mondial avec un maillot siglé Nike. C'était chose faite en 2002 lors de la Coupe du monde en Corée et au Japon. Il retournait ensuite à Barcelone où il fondait sa propre société de conseil et de marketing appelée Bonus Sports Marketing (BSM).
Le principal client de BSM est le gouvernement du Qatar pour qui la firme de Rosell a développé le programme "Football Dreams" afin de lutter contre l'obésité des jeunes qataris en les incitant à faire du sport. BSM compte également de nombreuses multinationales parmi ses clients dont Damm, Audi, Mc Donalds, Electrolux et San Miguel.

Ronaldinho avec Rosell
(c) fcbarcelone-krax.skyrock.com

Ami de Laporta, Sandro Rosell s'alliait à lui en 2003 pour former une candidature à la présidence du FC Barcelone. Laporta devenait président avec une ample majorité de voix et Sandro Rosell était nommé vice-président de l'aire sportive, soit le numéro 2 du club après Laporta. Juste après les élections, les nouveaux dirigeants du Barça ne parvenant pas à recruter l'anglais David Beckham, reportaient alors leurs efforts sur le recrutement de Ronaldinho, également convoité par Manchester United. Sandro Rosell, un ami proche du joueur brésilien depuis son passage par la filiale de Nike au Brésil parvint à le convaincre de signer pour le FC Barcelone.

En juin 2005, Sandro Rosell démissionnait avec fracas de son poste accusant Laporta de ne pas tenir ses engagements. Rosell, contre l'avis de Laporta, voulait évincer l'entraîneur Frank Rijkaard et était opposé à la venue de l'avant-centre Samuel Eto'o à l'été 2004 par crainte de froisser son ami Florentino Pérez.

En juin 2008, Sandro Rosell annonçait sa candidature à la présidence du FC Barcelone en 2010. Dans le même temps, Rosell donnait son appui à la motion de censure déposée par Oriol Giralt contre Joan Laporta, lequel accusait alors Rosell d'être l'instigateur de cette motion et déclarait que Rosell ne serait pas un bon président pour le Barça. La motion échouait et Joan Laporta continuait à présider le club jusqu'à la fin de son second mandat en juin 2010.
Selon Agustí Benedito, autre candidat à la présidence du FC Barcelone, la candidature de Sandro Rosell est liée au parti catalaniste de centre-droit Convergència i Unió.
Le 13 juin 2010, Sandro Rosell remportait les élections avec 61,35% des voix, loin devant Agustí Benedito, Marc Ingla et Jaume Ferrer. Il devint ainsi le trente-neuvième président de l'histoire du FC Barcelone.

"Qatar foundation" le nouveau sponsor

Convergència i Unió (CIU) est un parti nationaliste catalan qui défend la Catalogne comme nation à l'intérieur de l'Espagne avec un niveau d'autonomie le plus élevé possible. Vous l'aurez compris, bien que brouillé avec Laporta, Rosell s'inscrit dans sa continuité. Il est de même un homme de réseaux, un homme "mondial" ayant travaillé pour Nike et collaboré avec Coca-Cola, NBC ou Sports Illustrated.

Le choix de "Qatar foundation" comme sponsor maillot n'est certainement pas étranger au fait que le gouvernement du Qatar était déjà le principal client de BSM, l'ancienne société de Rosell, dont la vente fut finalisée par l'intéressé en 2010 pour éviter qu'il y ait conflit d'intérêts. On pourrait en revanche se poser la question de l'investissement de tous ces millions de pétrodollars qataris au sein de BSM puis du Barça, club porte-drapeau de la Catalogne indépendante ?

Le faucon du Barça pour le Qatar
(c) sportune.fr

En novembre dernier, Sandro Rosell et le vice-directeur financier du club, Javier Fraus se rendaient au Qatar et faisaient cadeau à leur investisseur d'un faucon femelle, élevé en Catalogne.
Dans ce pays, il s'agit d'un animal sacré et même que la chasse au faucon y est très prisée.

Le Qatar est allié des Etats-Unis et il joue sa carte au sein du projet impérialiste-mondialiste porté par ces derniers. Le journaliste Georges Malbrunot avait par exemple expliqué que "Le Qatar avait envoyé pas moins de 5 000 membres de ses forces spéciales en Libye, bien avant la chute du colonel Kadhafi" :
http://blog.lefigaro.fr/malbrunot/2011/11/5-000-forces-speciales-du-qata.html

Mondialisme et régionalisme vont de pair. Pour l'instant. Quand les mondialistes auront liquidé les Etats en les court-circuitant de l'intérieur par le réveil des régionalismes tout en les affaiblissant de l'extérieur par des structures telle que l'Europe de Bruxelles, alors ensuite, ils s'efforceront de faire disparaître les identités et les régions. Tel est le but final recherché : une société mondiale unifiée composée d'hommes nouveaux, qui consommeront pareil, d'un bout à l'autre de la planète.

Les dirigeants du Barça savent-ils seulement avec qui ils ont pactisé ?

(c) panoramio.com

En réaction à leurs banderoles habituelles "Catalonia is not Spain" (image, plus haut) les supporters de l'Espanyol souhaitaient informer ceux du Barça que le Qatar n'est pas la Catalogne
(c) sports.yahoo.com/blogs/soccer-dirty-tackle

Sources :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fondation_du_Qatar
http://fr.wikipedia.org/wiki/Joan_Laporta
http://www.liberation.fr/sports/010161833-le-barca-et-l-unicef-la-morale-du-maillot
http://www.franceculture.fr/oeuvre-minorites-et-regionalisme-en-europe-dans-l-europe-federale-des-regions-enquete-sur-le-plan-al
http://www.sofoot.com/so-foot-n90-les-renards-148421.html
http://sports.orange.fr/infos/football/201049/barcelone-la-fin-d-une-epoque_301089.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Unicef
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sandro_Rosell
http://www.expansion.com/2010/04/08/catalunya/1270756410.html
http://en.wikipedia.org/wiki/Convergence_and_Union
http://48fm.com/fairplay/2011/01/18/la-qatar-la-nouvelle-diplomatie-du-football/
http://www.sportune.fr/article/fc-barcelone-avant-saragosse-il-offre-un-faucon-au-qatar-42678

1 commentaire:

  1. Belle article, bien écrit... On mesure aujourd’hui 6 ans après, que le Barça à servi de cheval de Troie pour la percée du Quatar dans le Football : Rachat du PSG, Coupe du Monde 2022... et on peut développer en disant que pour les Quataris, le Football leur permet d'influencer la sphère politique et économique européenne et mondial...
    comme quoi, une simple Flocage à une porter beaucoup plus politique...

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